Législation-Tunisie

Loi n° 99-41 du 10 mai 1999, modifiant et complétant la loi n° 91-64 du 29 juillet 1991 relative à la concurrence et aux prix
(JORT n° 39 du 14 mai 1999, page 703 et suiv.)


Au nom du Peuple ;

La chambre des Députés ayant adopté ;

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

ArticleArticle Premier. - Les articles 5, 9, 10, 10 (bis), 11, 12, 13, 14, 15, 16, 16 (bis), 17, 19, 23, 33, 34, 38, 43 et 62 de la loi n° 91-64 du 29 Juillet 1991 relative à la concurrence et aux prix telle que modifiée par la loi n° 93-83 du 26 Juillet 1993 et la loi n° 95-42 du 24 Avril1995, sont modifiés comme suit:

Article Art. 5 (nouveau). - Sont prohibées les actions concertées et les ententes expresses ou tacites visant à empêcher, restreindre ou fausser le jeu de la concurrence sur le marché, lorsqu'elles tendent à :

  1. Faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu de l'offre et de la demande;
  2. Limiter l'accès au marché à d'autres entreprises ou le libre exercice de la concurrence;
  3. Limiter ou contrôler la production, les débouchés, les investissements, ou le progrès technique;
  4. Répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement. Sont prohibés, sauf cas exceptionnels autorisés par le ministre chargé du Commerce après avis du Conseil de la Concurrence, les contrats de concession et de représentation commerciale exclusive.

Est prohibée, également, l'exploitation abusive d'une position dominante sur le marché intérieur ou sur une partie substantielle de celui-ci, ou d'un état de dépendance économique dans lequel se trouve une entreprise cliente ou fournisseur qui ne dispose pas de solutions alternatives, pour la commercialisation, l'approvisionnement ou la prestation de service.
L'exploitation abusive d'une position dominante ou d'un état de dépendance économique peut consister notamment en refus de vente ou d'achat, en ventes ou achats liés , en prix minimums imposés en vue de la revente, en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales sans motif valable ou au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.
Est nul, de plein droit, tout engagement, convention ou clause contractuelle se rapportant à l'une des pratiques prohibées en vertu du présent article.

Article Art. 9 (nouveau). - Il est institué une commission spéciale dénommée conseil de la concurrence dont le siège est à Tunis.
Il est appelé à connaître des requêtes afférentes aux pratiques anticoncurrentielles telles que prévues par l'article 5 de la présente loi.
Le ministre chargé du commerce peut de sa propre initiative ou sur demande du Gouvemement soumettre à l'avis du Conseil les projets de textes législatifs et réglementaires, et toutes les questions afférentes au domaine de la concurrence.
Les organisations professionnelles ou syndicales, les organismes ou groupements de consommateurs agréés, les chambres d'agriculture ou du commerce et d'industrie peuvent également requérir l'avis du Conseil par l'intermédiaire du ministre chargé du commerce sur les questions de concurrence dans les secteurs relevant de leur ressort.
Le ministre chargé du commerce peut également soumettre, s'il le juge nécessaire, à l'avis du conseil de la concurrence tout projet de concentration ou toute concentration visés à l'article 7.
Dans ce cas, le ministre chargé du commerce avise les parties concemées de cette saisine, et le délai de réponse prévu à l'article 8 est porté de trois à six mois.

Article Art. 10 (nouveau). - Le conseil de la concurrence est composé de treize (13) membres comme suit:

  1. Un président exerçant ses fonctions à plein temps, nommé parmi les membres magistrats ou les personnalités choisies pour leur compétence en matière économique ou en matière de concurrence ou de consommation.
    Le président du conseil de la concurrence est nommé pour un mandat de cinq ans non renouvelable s'il est choisi parmi les magistrats, et renouvelable une seule fois s'il est choisi parmi les personnalités nommées en raison de leur compétence en matière économique ou en matière de concurrence ou de consommation.
  2. Deux vice-présidents :
    - un conseiller au tribunal administratif en tant que premier vice-président exerçant ses fonctions à plein temps ;
    - un conseiller auprès de l'une des deux chambres chargées du contrôle des entreprises publiques à la cour des comptes en tant que deuxième vice-président exerçant ses fonctions à plein temps.
    Les deux vice-présidents sont nommés pour une durée de cinq ans renouvelable une seule fois.
  3. Quatre magistrats de deuxième grade au moins.
    Sous réserve des dispositions relatives au détachement prévues par la loi portant statut particulier des magistrats, les membres magistrats sont nommés pour une durée de cinq ans renouvelable une seule fois s'ils sont en situation d'exercice dans leur corps d'origine.
  4. Quatre personnalités ayant exercé ou exerçant dans le domaine de la production, de la distribution, de l'artisanat ou des prestations de service, nommées pour un mandat de quatre ans non renouvelable.
  5. Deux personnalités choisies en raison de leur compétence en matière économique ou en matière de concurrence ou de consommation, nommées pour un mandat de six ans non renouvelable.

Le président, les deux vice-présidents et les membres du conseil sont nommés par décret pris sur proposition du ministre chargé du commerce.

Article Art. 10 (Bis) (nouveau). - Les modalités d'organisation administrative et financière et de fonctionnement du conseil de la concurrence sont fixées par décret pris sur proposition du ministre chargé du commerce.
Le conseil de la concurrence établit son règlement intérieur.
Il établit également un rapport sur son activité annuelle qui doit être soumis au Président de la République.
Ce rapport auquel est annexés l'ensemble des décisions et avis rendus par le conseil sera publié.

Article Art. 11 (nouveau). - Les requêtes sont portées devant le conseil de la concurrence par le ministre chargé du commerce de sa propre Initiative ou sur demande du gouvernement, les entreprises, les organisations professionnelles ou syndicales, les organismes ou groupements de consommateurs agréés, ou par les chambres d'agriculture, ou de commerce et d'industrie.
Le conseil peut également se saisir d'office en cas de retrait de la requête par les parties et au cas où les investigations dans une affaire portée devant le conseil font apparaître des pratiques anticoncurrentielles sur un marché en relation directe avec celui objet de la requête.
Sont prescrites les actions afférentes à des pratiques anticoncurrentielles remontant à plus de trois ans.
Les requêtes sont adressées au président du conseil de la concurrence par lettre recommandée avec accusé de réception ou par dépôt auprès du secrétariat permanent du conseil avec décharge, et ce, soit directement soit par l'entremise d'un avocat.
La requête doit comporter les éléments préliminaires de preuve et doit être présentée en quatre exemplaires.
Le secrétariat permanent du conseil transmet au ministre chargé du commerce copie de toutes les requêtes reçues à l'exception de celles introduites par le Ministère lui même.

Article Art. 12 (nouveau). - Il est désigné auprès du conseil de la concurrence un secrétaire permanent nommé par décret parmi les fonctionnaires de la catégorie "A".
Le secrétaire permanent est chargé notamment de l'enregistrement des requêtes, de la tenue et de la conservation des dossiers et documents, de l'établissement des procès-verbaux des séances et de la consignation des délibérations et décisions du conseil. Il assure, en outre, toute autre fonction qui lui est confiée par le président du conseil.

Article Art. 13 (nouveau). - Il est désigné auprès du conseil de la concurrence un rapporteur général et des rapporteurs nommés par décret parmi les magistrats ou les fonctionnaires de la catégorie "A".
Le rapporteur général assure la coordination, le suivi, le contrôle et la supervision des travaux des rapporteurs ainsi que toute autre mission qui lui est confiée par le président du conseil.
Le président du conseil peut désigner des rapporteurs contractuels choisis pour leur expérience et compétence dans les domaines de la concurrence et de la consommation.
Le rapporteur procède à l'instruction des requêtes qui lui sont confiées par le président du conseil.
À cet effet, il vérifie les pièces du dossier et peut réclamer aux personnes physiques et morales concernées, sous le sceau du président du conseil, tous les éléments complémentaires nécessaires aux investigations.
Il peut procéder dans les conditions réglementaires, et après autorisation du président du conseil; à toutes enquêtes et investigations sur place. Il peut également se faire communiquer tout document qu'il estime nécessaire à l'instruction de l'affaire.
Le rapporteur peut demander, sous le sceau du président du conseil, que des enquêtes ou expertises soient effectuées notamment par les agents chargés du contrôle économique ou technique.
À l'occasion de l'instruction des affaires dont ils ont la charge, les rapporteurs non contractuels disposent des mêmes prérogatives prévues à l'article 55 de la présente loi. À cet effet, une carte professionnelle leur sera attribuée.

Article Art. 14 (nouveau). - À l'issue de l'instruction, le rapporteur rédige pour chaque affaire un rapport dans lequel il présente ses observations. Ce rapport est transmis par le président du conseil, par lettre recommandée avec accusé de réception, aux contrevenants qui disposent d'un délai d'un mois pour présenter par écrit, soit par eux-mêmes soit par l'entremise d'un avocat, les moyens de défense qu'ils jugent utiles.
Le Président du conseil transmet également une copie du rapport au commissaire du gouvernement qui doit présenter les observations de l'administration dans le même délai indiqué au paragraphe précédent.
Sous réserve des dispositions de l'article 18 de la présente loi, les parties et le commissaire du gouvernement sont en droit de prendre connaissance des pièces du dossier.

Article Art. 15. (nouveau). - Les séances du conseil de la concurrence ne sont pas publiques. Les rapports sont présentés au conseil suivant le tour de rôle préparé par le secrétaire permanent et arrêté par le président du conseil.
Le conseil procède à l'audition des parties concernées régulièrement convoquées et qui peuvent se faire représenter par leurs avocats ou conseillers Le conseil entend également le commissaire du gouvernement et toute personne qui lui paraît susceptible de contribuer à son information.
L'avocat ou le conseiller peuvent présenter leur plaidoirie même en l'absence des parties.
Le conseil statue à la majorité des voix et prononce son jugement de façon contradictoire.
Chaque membre du Conseil dispose d'une voix.

Article Art. 16 (nouveau). - Il est créé au sein du conseil de la concurrence une ou plusieurs sections. Au début de chaque année judiciaire, le président du conseil fixe leur nombre et leur composition et désigne leurs membres.
Chaque section est présidée par le président du conseil ou par l'un de ses deux vice-présidents. La section est composée en plus de son président, de quatre membres dont au moins un magistrat. Les sections statuent dans les affaires qui leur sont transmises par le président du conseil, à la majorité des voix et prononcent leur jugement de façon contradictoire.
Le ministre chargé du commerce peut, sur proposition du président du conseil, procéder au remplacement de tout membre du conseil qui n'a pas participé, sans motif valable, à trois séances consécutives du conseil.
Aucun membre ne peut délibérer dans une affaire s'il est frappé d'une interdiction au sens de l'article 248 du Code des procédures civiles et commerciales.
Toute partie concernée peut récuser tout membre du conseil par voie de demande écrite soumise au président du conseil qui tranche définitivement la question dans un délai de cinq jours après l'audition des deux parties.

Article Art. 16 (bis) (nouveau). - L'assemblée plénière du conseil de la concurrence connaît des demandes d'avis présentées au conseil par le ministre chargé du Commerce.
Elle connaît également des affaires renvoyées par le tribunal administratif après l'infirmation de leur jugement.
Les membres du conseil qui ont statué sur une affaire au niveau de la section ne peuvent participer aux travaux de l'assemblée plénière.
Dans tous les cas, le conseil de la concurrence ne peut valablement délibérer en séance plénière que si au moins la moitié de ses membres dont au moins quatre magistrats sont présents.

Article Art. 17 (nouveau). - Le rapporteur général, le rapporteur ainsi que le secrétaire permanent assistent aux séances du conseil de la concurrence et à la séance de délibération sans voix délibérante.

Article Art. 19 (nouveau). - Si les faits invoqués n'entrent pas dans le champ de sa compétence ou ne sont pas appuyés par des éléments de preuve, le conseil de la concurrence déclare la requête irrecevable.
Au cas où la requête est recevable sur le fonds, les décisions rendues par le conseil de la concurrence comportent obligatoirement:

  • la reconnaissance du caractère répréhensible ou non des pratiques soumises à son examen;
  • la condamnation, le cas échéant, des auteurs de ces pratiques aux sanctions prévues à l'article 34 de la présente loi.

ArticleArt. 23 (nouveau). - Est interdite toute vente ou offre de produits ou de marchandises ainsi que toute prestation ou offre de prestation de services faites aux consommateurs et donnant droit à titre gratuit immédiatement ou à terme, à une prime consistant en produits, marchandises ou services, sauf s'ils sont identiques à ceux qui font l'objet de la vente.
Ces dispositions ne sont pas applicables aux menus objets de faible valeur ni aux échantillons, ni aux produits conçus spécialement pour des fins publicitaires et portant la marque commerciale, ainsi qu'aux services de faible valeur. La valeur maximale de ces produits ou services ne peut excéder un montant fixé par arrêté du ministre chargé du commerce.

Article Art. 33 (nouveau). - Indépendamment des dispositions du titre II de la présente loi, est assimilé à la pratique des prix illicites au sens du présent titre, le fait pour tout commerçant, industriel, artisan ou prestataire de service:

  1. de mettre en vente un produit qui n'a pas fait l'objet d'une décision de fixation de prix, conformément à la réglementation en vigueur;
  2. de dissimuler dans un dépôt quelconque, des marchandises dont son magasin n'est pas approvisionné ;
  3. de ne pas présenter à la première demande des agents chargés de la constatation des infractions en matière économique, des factures en originaux ou en copies.
  4. d'utiliser ou de tenter d'utiliser des produits subventionnés à des fins autres que celles auxquelles ils sont destinés ainsi que leur détention ou leur commercialisation selon des procédures non conformes aux dispositions réglementaires en vigueur.

Article Art. 34 (nouveau). - Les opérateurs ayant méconnu l'une des prohibitions édictées à l'article 5 (nouveau) de la présente loi, sont sanctionnés, sans préjudice de peines prononcées par les tribunaux, par une amende pécuniaire infligée par le conseil de la concurrence institué par l'article 9 de la présente loi. Le montant de ladite amende ne peut excéder 5 % du chiffre d'affaires réalisé en Tunisie par l'opérateur concerné au cours du dernier exercice écoulé.
Au cas où le contrevenant aux dispositions de l'article 5 est une personne morale ou une organisation n'ayant pas un chiffre d'affaires propre, l'amende pécuniaire varie de 1000 à 50 000 dinars, et ce, sans préjudice des sanctions qui pourraient être infligées à titre individuel à ses membres contrevenants.

Article Art. 38 (nouveau). - Sont punis d'une amende allant de 50 à 5 000 dinars, le refus de vente, la non-répercussion des réductions des prix au profit du consommateur, la vente liée, ainsi que la détention, l'utilisation et la commercialisation des produits d'origine inconnue, tels que prévus aux articles 24, 24 (bis) et 29 (nouveau) de la présente loi.

Article Art. 43 (nouveau). - Sont punies d'une amende de 50 à 10.000 dinars, les infractions ci-après:

  • le refus de communication ou la dissimulation des documents visés à l'article 33 de la présente loi;
  • la communication de renseignements inexacts ou incomplets, à l'appui d'une demande de fixation des prix de produits et services visés à l'article 3 de la présente loi;
  • l'incitation à la pratique des prix non conformes aux prix fixés, ou la fixation de prix par des personnes non habilitées;

Article Art. 62 ( nouveau ). - Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur à partir de la date de sa publication au Joumal Officiel de la République Tunisienne, et sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires.

Article Art. 2. - Sont ajoutés à la loi n° 91-64 du 29 Juillet 1991 relative à la concurrence et aux prix telle que modifiée par la loi n° 93-83 du 26 Juillet 1993 et la loi n° 95-42 du 24 Avril 1995, les articles 13 bis, 24 bis et 55 bis libellés comme suit:

Article Art. 13 (bis). - Il est désigné auprès du conseil de la concurrence un commissaire du gouvernement représentant le ministre chargé du Commerce ayant pour mission de défendre l'intérêt général dans les affaires relatives aux pratiques anticoncurrentielles prévues par l'article 5, et de présenter les observations de l'administration devant le conseil.

Article Art. 24 (bis). - En cas de réductions des taxes fiscales et parafiscales décidées par l'État et touchant la structure des prix, les producteurs et les commerçants doivent répercuter ces réductions sur leurs prix de vente.
En cas de réduction des prix par le producteur ou le grossiste de manière exceptionnelle ou temporaire pendant les campagnes, le consommateur final doit bénéficier de cette réduction quel que soit le régime des prix du produit.

Article Art. 55 (bis). - Est puni d'un emprisonnement de seize jours à trois mois et d'une amende de 50 à 5.000 dinars ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque s'oppose à l'exercice des fonctions des agents chargés de la constatation des infractions prévues par la présente loi.

La présente loi sera publiée au Journal Officiel de la République Tunisienne et exécutée comme loi de l'Etat.

Tunis, le 10 mai 1999.

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