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Législation-Tunisie

L’Infraction de corruption :
Etude comparative entre le droit français et le droit tunisien

D.E.A. de Sciences Criminelles

Université des sciences sociales, Toulouse 2003/2004
Mémoire écrit par : M. EL AIR Mohamed Zied sous la direction de M. Marc Segonds, maître de conférence.

Le droit tunisien en libre accès

COMPARAISON RELATIVE À LA REPRESSION
CHAPITRE PREMIER : COMPARAISON DE LA PROCEDURE
SECTION 2 : LES PROBLEMES RELATIFS A LA MISE EN OEUVRE DE LA POURSUITE
Para II : La prescription de l’action publique
B - Le retardement du point de départ du délai de prescription par la jurisprudence

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La Cour de cassation française, malgré l'absence de textes, soucieuse de retarder le plus possible le point de départ du délai de prescription, a élaboré et développé une jurisprudence ne faisant pas courir le délai de prescription de certaines infractions instantanées du jour de leur consommation. Deux formes d’infractions instantanées sont concernées par cette jurisprudence celles qui s'exécutent sous forme de remises successives de fonds ou d'actes réitérés, et celles qui sont occultes ou s'accompagnent de manœuvres de dissimulation qui les rendent difficile à découvrirNote .

S’agissant d’abord des infractions s’accompagnant de manœuvres de dissimulation, l’exemple type est celui de l’abus de biens sociaux. En effet à raison de la nature occulte de ce délit, un délai de prescription de trois ans à compter du jour de sa consommation n'aurait pas permis, dans la plupart des cas, d'exercer des poursuites contre son auteur qui aurait ainsi bénéficié d'une impunité inacceptable. C'est pourquoi la Cour de cassation s'est efforcée de retarder le point de départ de la prescription. Cette jurisprudence a connu une évolution qui s'est déroulée en trois phases.
Dans un premier temps la Cour de cassation a retardé le point de départ de la prescription triennale au jour où le délit est apparu et a pu être constaté, c’est à dire au jour de la découverteNote .
Dans un deuxième temps la Cour de cassation a précisé que le point de départ de la prescription triennale doit être fixé au jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique, en d’autres termes, par les seules personnes habilitées à mettre cette action en mouvement : les victimes et le ministère publicNote .
Enfin la chambre criminelle s’est fondée sur les dispositions du Code de commerce pour décider que le délai de prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux ne commence à courir, sauf dissimulation, qu'à compter de la présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises indûment à la charge de la sociétéNote .

S’agissant ensuite des infractions instantanées qui s’exécutent sous forme de remises successives de fonds ou d'actes réitérés, on peut citer l’escroquerie, le trafic d’influence, le délit de prise illégale d’intérêt et le délit de corruptionNote . Concernant ce dernier délit, il est admis, depuis la réforme de 1943, qu’il est pleinement consommé, dès que le fonctionnaire a sollicité des dons, des présents ou des promesses ou dès que le corrupteur a formulé des propositions illicites.

Or c’est ce point de départ retardé du délai de prescription qui a posé un problème. La difficulté apparaît spécialement dans le cas d'un pacte délictueux remontant à plus de trois années, mais dont l'exécution échelonnée se poursuit actuellement : l'activité présente du corrupteur et du corrompu n'échappe-t-elle pas à l'action publique, au prétexte que l'accord initial est maintenant hors d'atteinte de la loi pénale ?Note
Pour empêcher l’accomplissement éventuel de la prescription, la Cour de cassation a décidé que si le délit de corruption est une infraction instantanée, consommée dès la conclusion du pacte de corruption entre le corrupteur et le corrompu, il se renouvelle à chaque acte d'exécution dudit pacte. Cette solution a été reprise par plusieurs arrêtes qui utilisent la même formule, à savoir :« Des délits successifs se sont renouvelés aussi longtemps qu'a existé le concert frauduleux »Note .
D’après le professeur Vitu Cette solution ne contredit nullement l'affirmation, toujours exacte, que la corruption de personnes chargées d'une fonction publique est une infraction instantanée. Il ajoute que le législateur « attache équivalemment la qualification de corruption consommée à la sollicitation d'une rémunération, à l'acceptation d'offres ou de promesses, et à la réception de dons ou de présents : ces divers moments, qui peuvent être séparés dans le temps par des intervalles plus ou moins longs, caractérisent tous identiquement l'accomplissement de la corruption; à chaque manifestation de la volonté coupable, le délit se manifeste à nouveau complètement »Note.

A notre sens, deux remarques doivent être faites à ce niveau. La première est relative au législateur tunisien qui ne retarde pas le point de départ des infractions instantanées. Cette solution respecte certes la règle de l’interprétation stricte de la loi mais elle a pour inconvénient d’empêcher la répression des faits de corruption.
La deuxième est destinée aux deux législateurs, il est temps, en effet, que les délais de prescription soient allongés afin d’éviter qu’ils soient un obstacle à la répression. Nous proposons que ce délai soit porté à cinq ans en matière de délit et à quinze ans en matière de crime.

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