Source : Page officielle de la présidence du Gouvernement tunisien - 18 mars 2024
Bonjour,
Mieux mobiliser les capitaux extérieurs.
Tel est le quatrième objectif qu’assigne la présidence du gouvernement à la modification ou abrogation/remplacement du code des changes adopté par le conseil des ministres du 14 mars 2023.
Étonnant. Je m’interroge sur la nature de l’objectif ainsi assigné qui ne peut à mon sens que se rapporter aux possibilités dont pourraient bénéficier les entreprises résidentes à mobiliser des ressources d’emprunt sur les marchés financiers étrangers.
Les Investissements directs étrangers auxquels pourrait penser, ne sont pas considérés en tant que « capitaux extérieurs », car leur contenu est très diversifié et ne sont pas uniquement constitués de capitaux, du moins pour ce qui concerne la Tunisie et la nature des investissements directs qu’on y fait. Donc, nul besoin d’envisager pour cet objectif tel que libellé, les IDE mais simplement les emprunts extérieurs.
S’agissant des emprunts des emprunts de l’État, une procédure particulière leur est appliquée. Donc, nul besoin de les envisager dans ce commentaire.
Ne sont utilement à considérer, pour notre sujet, que les
emprunts extérieurs des entreprises résidentes. Or, voilà trente ans que les entreprises ont été autorisées à contracter des crédits extérieurs. En effet, le décret n° 93-1696 du 16 août 1993 a modifié le décret n° 77-608 du 21 janvier 1976 en y ajoutant un article 17 bis ainsi libellé :
Article 17 bis : Les entreprises résidentes sont autorisées à contracter des crédits extérieurs pour les besoins de leurs activités et dans les limites et les conditions qui sont fixées par circulaire de la Banque Centrale de Tunisie.
Les limites et les conditions des emprunts extérieurs des entreprises ont été fixées par la Banque centrale de Tunisie par sa circulaire n° 93-16 du 7 octobre 1993 modifiée à deux reprises ainsi que l’indique
le site de la Banque centrale consulté ce jour.
Il semble cependant que selon la circulaire
Circulaire aux intermédiaires agréés n° 2020-13 du 2 juin 2020 publiée au journal officiel de la République n° 56 du 16 juin 2020, la circulaire n° 93-16 du 7 octobre 1993 mentionnée sur le site de la BCT a été abrogée. Les nouvelles conditions et limites d’emprunt applicables aujourd’hui se présentent comme suit :
Montant plafond des emprunts pouvant être contractés sans autorisation de la BCT
(en Millions de dinars)
| | Durée de | remboursement |
| | 12 mois au plus | Plus de 12 mois |
| | | Cotées en bourse ou ayant une notation | |
| | | Oui | Non |
Banques | | 25 | Néant | 30 |
Autres | | 10 | 50 | 30 |
Il ressort ainsi que si mon interprétation de l’objectif est correcte — et il ne me semble pas qu’il y en ait une autre — une
« meilleure mobilisation des capitaux extérieurs » ne peut figurer parmi les objectifs visés par le nouveau code des changes adopté par le conseil des ministres du 14 mars 2024, car, depuis 1993, les emprunts extérieurs ne sont plus soumis à une autorisation systématique de la Banque centrale de Tunisie ainsi qu’en dispose l’article 17 bis du décret 77-608 du 27 juillet 1977.
Par ailleurs, la Banque a, au cours des trente années qui ont suivi cette libéralisation, assoupli à trois reprises les conditions des emprunts qui peuvent être réalisés sans son autorisation. La meilleure mobilisation
future des ressources extérieures qu’elle soit liée aux
montants des plafonds des emprunts et leur relèvement ou liée à l’
assouplissement des conditions ne relèvent actuellement que des attributions exclusives de la Banque.S’exprimant lors d’un webinaire, organisé récemment par l’IACE, sur le thème «Est-ce que le nouveau code des changes répond aux aspirations des opérateurs économiques ?», Sonia Zoghlami, directrice générale au ministère des Finances, a informé l’assistance qu’il est prévu de
supprimer le plafond du montant que les entreprises non cotées en bourse pourront mobiliser. (Source :
La Presse.tn)
Or, cette mesure relève des attributions de la Banque centrale et peut être introduite que le nouveau code des changes soit ou non adopté par l'Assemblée des Représentants du Peuple et si comme l'estiment les autorités, la mesure est bénéfique aux entreprises, et contribue à réduire les besoins en financements extérieurs de la Tunisie,
il n'y a aucune raison d'attendre encore l'adoption du nouveau code des changes. On est quelque peu surpris qu'un haut fonctionnaire inscrive cet assouplissement parmi ceux que la modification du code des changes va apporter du moment que
toutes les libertés de conclure des emprunts à l'étranger ont déjà été données par le décret d'application actuel du code des changes et que par conséquent la possibilité d'améliorer les conditions de ces emprunts ne relèvent plus du code des changes mais de ses textes d'application et donc du ministère des Finances et de la banque centrale, cette dernière en particulier.